textes carêmes Jeudi 4e semaine



Jeudi de la quatrième semaine de carême


Epitre (IV R IV, 25-38) ;

En ces jours-là une femme de Sunam vint trouver le prophète Elisée, sur la montagne du Carmel ; et, lorsque l’homme de Dieu l’eut aperçue de loin, il dit à Giézi son serviteur : Voilà cette Sunamite. Va au-devant d’elle, et dis-lui : Tout va-t-il bien pour vous, et pour votre mari, et pour votre fils ? Et elle lui répondit : Bien. Et lorsqu’elle fut arrivée auprès de l’homme de Dieu sur la montagne, elle lui saisit les pieds, et Giézi s’approcha pour l’éloigner. Mais l’homme de Dieu lui dit : Laisse-la ; son âme est dans l’amertume, et le Seigneur me l’a caché et ne me l’a pas révélé. Alors cette femme lui dit : Vous ai-je demandé un fils, mon seigneur ? Ne vous ai-je pas dit : Ne me trompez pas ? Elisée dit à Giézi : Ceins tes reins, prends mon bâton dans ta main, et pars. Si tu rencontres quelqu’un, ne le salue point ; et si quelqu’un te salue, ne lui réponds pas, et mets mon bâton sur le visage de l’enfant. Mais la mère de l’enfant dit à Elisée : Vive le Seigneur et vive votre âme, je ne vous quitterai pas. Il alla donc avec elle, et il la suivit. Cependant Giézi les avait précédés, et il avait mis le bâton sur le visage de l’enfant. Mais il n’y avait ni voix ni sentiment ! Il revint au-devant de son maître, et lui dit : L’enfant n’est pas ressuscité. Elisée entra donc dans la maison, et il trouva l’enfant mort couché sur son lit. Il ferma aussitôt la porte sur lui et sur l’enfant, et invoqua le Seigneur. Il monta alors sur le lit et se coucha sur l’enfant. Il mit sa bouche sur sa bouche, ses yeux sur ses yeux et ses mains sur ses mains, et il se courba sur lui, et la chair de l’enfant fut échauffée. Et Elisée s’éloigna, alla ça et là dans la maison, puis il remonta sur le lit et se coucha sur l’enfant. Alors l’enfant éternua sept fois, et ouvrit les yeux. Elisée appela Giézi, et lui dit : Fais venir cette Sunamite, elle vint et entra dans la chambre. Elisée lui dit : Prenez votre fils. Et elle s’approcha de lui et se jeta à ses pieds et se prosterna contre terre et ayant pris son fils, elle s’en alla. Et Elisée retourna à Galgala.

Saint Evangile selon Saint Luc (Lc VII, 11-16) ;

En ce temps-là, Jésus se rendait dans une ville appelée Naïm ; et ses disciples allaient avec lui, ainsi qu’une foule nombreuse. Et comme il approchait de la porte de la ville, voici qu’on emportait un mort, fils unique de sa mère, et celle-ci était veuve ; et il y avait avec elle beaucoup de personnes de la ville. Lorsque le Seigneur l’eut vue, touché de compassion pour elle, il lui dit : Ne pleure point. Puis il s’approcha, et toucha le cercueil. Ceux qui le portaient s’arrêtèrent. Et il dit : Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi. Et le mort se mit sur son séant, et commença à parler. Et Jésus le rendit à sa mère. Tous furent saisis de crainte, et ils glorifiaient Dieu, en disant : Un grand prophète a surgi parmi nous, et Dieu a visité son peuple.

Leçon de saint Ambroise ;

Cet endroit de l’Évangile se rapporte à l’une et à l’autre grâce (dont nous allons parler). Il a d’abord pour but de nous donner l’assurance que la miséricorde divine se laisse vite fléchir par les gémissements d’une mère veuve, et surtout d’une mère brisée par la maladie ou la mort de son fils unique, d’une veuve enfin dont le mérite et la gravité sont prouvés par la foule qui l’accompagne aux funérailles. Il est destiné encore à nous faire voir plus qu’une simple femme dans cette veuve, entourée d’une grande foule de peuple, qui mérita d’obtenir par ses larmes la résurrection d’un jeune homme, son fils unique ; parce que cette veuve est l’image de la sainte Église, qui, en considération de ses larmes, obtient de rappeler du sein des pompes funèbres ou des profondeurs du sépulcre, pour le faire revenir à la vie, un jeune peuple qu’on lui a défendu de pleurer, parce que la résurrection lui est promise.
Le mort était porté au tombeau dans un cercueil par les quatre éléments matériels ; mais il avait l’espoir de ressusciter puisqu’il était porté dans du bois. Bien que le bois ne nous ait pas été utile autrefois, il a néanmoins, depuis que Jésus-Christ l’a touché, commencé à servir pour la vie ; afin de montrer que le salut devait être rendu au monde par le gibet de la croix. En entendant la parole de Dieu, ils s’arrêtèrent donc, ces impitoyables conducteurs de convois funèbres qui poussaient le corps humain vers la dissolution, par suite du cours mortel de la nature matérielle. Et nous, ne gisons-nous pas inanimés sur la civière mortuaire, c’est-à-dire sur un instrument des dernières pompes funèbres, lorsque le feu des passions déréglées nous brûle, ou que la froideur inonde nos âmes ou bien quand nous sentons la vigueur de notre esprit s’émousser sous le poids de ce corps terrestre et paresseux, ou encore lorsque la pure lumière faisant défaut à notre esprit, il nourrit notre âme d’un air épais et vicié ? Voilà les porteurs qui nous mènent au tombeau.
Mais quoique les derniers devoirs rendus aux morts aient enlevé toute espérance de vie, et que les corps des défunts gisent déjà près du tombeau, cependant, à la parole de Dieu, les cadavres ressuscitent aussitôt, la voix leur revient, un fils est rendu à sa mère, il est rappelé du tombeau, arraché du sépulcre. Quel est pour toi ce tombeau, sinon les mauvaises habitudes ? Ton tombeau, c’est ta déloyauté ; ton gosier est un sépulcre : « C’est un sépulcre ouvert que leur gosier », d’où sont proférées des paroles de mort. Le Christ te délivre de ce sépulcre ; tu sortiras de ce tombeau si tu écoutes la parole de Dieu. Et s’il est un péché grave que tu ne puisses laver toi-même par les larmes de la pénitence, que l’Église ta mère pleure pour toi, elle qui intervient en faveur de chacun de ses enfants, comme une mère veuve pour son fils unique, car elle est pleine de compassion et éprouve une douleur spirituelle qui lui est propre, lorsqu’elle voit ses enfants entraînés à leur perte par des vices mortels.