Mercredi de la 3ème semaine de carême

 

Textes liturgiques

Oraison - Faites, nous vous en supplions, Seigneur, que, formés par ces jeûnes salutaires, et nous éloignant aussi des vices si nuisibles, nous obtenions plus facilement les effets de votre miséricorde.

Epitre du livre de l’Exode (Ex XX, 12-24) - Ainsi parle le Seigneur : Honorez votre père et votre mère, afin que vous viviez longtemps sur la terre que le Seigneur votre Dieu vous donnera. Vous ne tuerez point. Vous ne commettrez point d’adultère. Vous ne déroberez point. Vous ne porterez point de faux témoignage contre votre prochain. Vous ne désirerez point la maison de votre prochain ; vous ne désirerez point sa femme, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne, ni aucune de toutes les choses qui lui appartiennent. Or tout le peuple entendait les tonnerres et le son de la trompette, et voyait les lampes ardentes et la montagne toute couverte de fumée. Et dans la crainte et l’effroi dont ils étaient saisis, ils se tinrent éloignés. Et ils dirent à Moïse : Parlez-nous vous-même, et nous vous écouterons ; mais que le Seigneur ne nous parle point, de peur que nous ne mourions. Moïse répondit au peuple : Ne craignez point, car Dieu est venu pour vous éprouver et pour imprimer sa crainte en vous, afin que vous ne péchiez point. Le peuple demeura donc à distance, et Moïse s’approcha de la nuée où était Dieu. Le Seigneur dit encore à Moïse : Vous direz ceci aux enfants d’Israël : Vous avez vu que c’est du ciel que je vous ai parlé. Vous ne ferez point de dieux d’argent, ni de dieux d’or. Vous me dresserez un autel de terre sur lequel vous m’offrirez vos holocaustes et vos hosties pacifiques, vos brebis et vos bœufs, en tous les lieux où la mémoire de mon nom sera établie.

Saint Evangile selon Saint Mathieu (Mt XV, 1-20) - En ce temps-là, des Scribes et des Pharisiens venus de Jérusalem, s’approchèrent de Jésus, en disant : Pourquoi vos disciples violent-ils la tradition des anciens ? Car ils ne lavent pas leurs mains lorsqu’ils mangent du pain. Mais Jésus leur répondit : Et vous, pourquoi violez-vous le commandement de Dieu, à cause de votre tradition ? Car Dieu a dit : Honore ton père et ta mère ; et : Que celui qui maudira son père ou sa mère soit puni de mort. Mais vous, vous dites : Quiconque aura dit à son père ou à sa mère : Tout don que je fais à Dieu vous profitera, ne sera pas tenu d’honorer son père et sa mère. Ainsi vous avez annulé le commandement de Dieu par votre tradition. Hypocrites, Isaïe a bien prophétisé de vous, quand il a dit : Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi ; ils me rendent un culte inutile, enseignant des doctrines et des ordonnances humaines. Puis, ayant appelé à lui les foules, il leur dit : Écoutez et comprenez. Ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme ; mais ce qui sort de la bouche, voilà ce qui souille l’homme. Alors les disciples, s’approchant, lui dirent : Savez-vous que les pharisiens, en entendant cette parole, se sont scandalisés ? Mais il répondit : Toute plante que mon Père céleste n’a pas plantée sera déracinée. Laissez-les : ce sont des aveugles qui conduisent des aveugles ; or, si un aveugle conduit un aveugle, ils tombent tous deux dans la fosse. Pierre, prenant la parole, lui dit : Expliquez-nous cette parabole. Et Jésus dit : Vous aussi, êtes-vous sans intelligence ? Ne comprenez-vous pas que tout ce qui entre dans la bouche va dans le ventre, et est jeté dans un lieu à part ? Mais ce qui sort de la bouche part du cœur, et c’est là ce qui souille l’homme. Car c’est du cœur que sortent les mauvaises pensées, les meurtres, les adultères, les fornications, les vols, les faux témoignages, les blasphèmes. Voilà les choses qui souillent l’homme ; mais manger sans s’être lavé les mains ne souille pas l’homme.

Oraison sur le peuple - Accordez-nous, s’il vous plaît, ô Dieu tout-puissant, à nous qui cherchons la grâce de votre protection, d’être délivrés de tous les maux et de vous servir d’une âme confiante.

Leçon de saint Jérôme (Lib. 2 Comment in cap. 15 Matth.) - Étonnante folie des pharisiens et des scribes ! Ils reprochent au Fils de Dieu de ne pas garder les traditions et les préceptes des hommes : « Car ils ne se lavent pas les mains lorsqu’ils mangent du pain. » Les mains, c’est-à-dire les œuvres, qu’il faut laver, ce ne sont pas celles du corps, mais celles de l’âme afin qu’en elles se réalise la parole de Dieu. « Il leur répondit : Et vous, pourquoi violez-vous le commandement de Dieu au nom de votre tradition ? » Par une réponse toute de vérité il réfute une calomnie toute de mensonge. Alors que vous, vous négligez, dit-il, les préceptes du Seigneur à cause d’une tradition des hommes, comment pensez-vous que mes disciples méritent un blâme parce qu’ils font peu de cas des prescriptions des anciens pour garder les préceptes de Dieu ?

« Car Dieu a dit : Honore ton père et ta mère, et aussi : Celui qui maudit son père ou sa mère sera mis à mort. Mais vous, vous dites : Quiconque dit à son père ou à sa mère : ‘Les secours que tu aurais pu recevoir de moi, j’en ai fait une offrande sacrée, celui-là n’aura pas à honorer son père ou sa mère. » Dans l’Écriture, l’honneur est bien moins dans les salutations et les marques de déférence que dans les aumônes et l’offrande de présents. « Honore les veuves, dit l’Apôtre, qui sont vraiment veuves. » Ici, l’honneur signifie un don. Et dans un autre passage : « Les presbytres qui exercent bien la présidence méritent un double honneur, surtout ceux qui peinent à la parole et à l’enseignement divin. » Ce précepte nous commande de ne pas museler le bœuf quand il foule le grain ; aussi, que l’ouvrier mérite son salaire !

En considération des infirmités, du grand âge ou de l’indigence des parents, le Seigneur avait ordonné aux enfants d’honorer leurs parents même en subvenant aux besoins de leur existence. Désireux d’annuler cette loi de Dieu si pleine de sagesse, tout en s’efforçant de travestir leur impiété sous le nom de piété, les scribes et les pharisiens enseignèrent aux enfants pervers que s’ils voulaient vouer à Dieu, leur père véritable, ce qui devait être offert à leurs parents, l’offrande au Seigneur passait avant le don aux parents ; ou bien sans doute, par crainte d’être incriminés de sacrilège, les parents eux-mêmes refusaient les biens qu’ils voyaient consacrés à Dieu et sombraient dans la misère. Et il arrivait que l’offrande des enfants, sous prétexte de servir au Temple de Dieu, passait au profit des prêtres.

Commentaire de Dom Guéranger

La Station, à Rome, est dans l’Église de Saint-Sixte, sur la Voie Appienne. On l’appelle aujourd’hui Saint-Sixte-le-Vieux, pour la distinguer d’une autre consacrée à la mémoire du même saint Pape et Martyr.

Sur l’Epître, devoirs envers Dieu et le prochain - L’Église nous rappelle aujourd’hui les préceptes du Seigneur qui ont rapport au prochain, en commençant par celui qui prescrit le respect des parents. Dans ce temps de réforme et de conversion, il est utile aux fidèles de se souvenir que c’est sur l’autorité de Dieu que reposent nos devoirs envers les hommes : d’où il suit que c’est Dieu même que nous avons offensé, quand nous avons péché contre nos semblables. Le Seigneur réclame d’abord ses propres droits ; il veut être adoré et servi ; il défend le culte grossier des idoles ; il prescrit l’observation du Sabbat, les sacrifices, les cérémonies ; mais en même temps il veut que l’homme aime son prochain comme lui-même ; il se déclare le vengeur de nos frères quand nous les avons lésés, si nous ne réparons pas le tort ou l’injure. La voix de Jéhovah est aussi tonnante sur le Sinaï, quand elle réclame les droits de notre prochain, que lorsqu’elle retentit pour déclarer à l’homme ses obligations envers son Créateur. Étant ainsi éclairés sur l’origine de nos devoirs, nous comprendrons mieux l’état de nos con-sciences, et combien nous sommes redevables à la justice de Dieu. Mais si l’ancienne loi, gravée sur des tables de pierre, sanctionne avec tant d’autorité le précepte de l’amour du prochain ; combien plus la nouvelle, scellée du sang de Jésus-Christ mourant sur la croix pour ses frères ingrats, nous révèlera-t-elle l’étendue du précepte de la charité fraternelle ! Ces deux lois sont devant nous ; elles sont le double texte sur lequel nous serons jugés ; hâtons-nous donc de nous conformer à ce qu’elles prescrivent, afin que cette parole du Sauveur s’accomplisse en nous : « Tout le monde verra que vous êtes mes disciples à l’affection que vous aurez les uns pour les autres. » (Johan. XIII, 35)

Sur l’Evangile, les pratiques extérieures - La loi que Dieu avait donnée à Moïse prescrivait un grand nombre de pratiques et de cérémonies extérieures ; et les Juifs fidèles les observaient avec zèle et ponctualité. Jésus lui-même, bien qu’il fût le législateur suprême, s’y conforma en toute humilité. Mais les Pharisiens avaient ajouté des traditions humaines et superstitieuses aux lois et aux ordonnances divines, et ils faisaient consister la religion dans ces inventions de leur orgueil. Le Sauveur vient au secours des faibles et des simples que ce faux enseignement pouvait égarer, et il rétablit le véritable sens des prescriptions extérieures. Les Pharisiens pratiquaient dans le cours de la journée un grand nombre de lotions, prétendant que s’ils ne se fussent pas ainsi lavé les mains, et même une fois par jour tout le corps, leur nourriture aurait été impure, à raison des souillures qu’ils avaient contractées par la rencontre ou le contact de mille choses qui n’étaient point signalées dans la loi. Jésus veut arracher les Juifs à ce joug humiliant et arbitraire, et il reproche aux Pharisiens d’avoir perverti la loi de Moïse.

Ce qui souille l’âme - Venant ensuite à juger le fond de ces pratiques, il enseigne qu’il n’y a point de créature impure par elle-même, que la conscience d’un homme ne saurait être souillée par le seul fait de la nourriture qui descend dans son estomac. « Ce qui a rendu l’homme coupable, ce sont, dit le Sauveur, les pensées mauvaises, les œuvres mauvaises, qui montent du cœur. » Les hérétiques ont prétendu trouver dans ces paroles la réprobation des pratiques extérieures qu’impose l’Église, et spécialement la condamnation des abstinences qu’elle prescrit ; mais en cela ils méritent qu’on leur applique à leur tour ce que Jésus-Christ disait aux Pharisiens : « Ce sont des aveugles qui conduisent d’autres aveugles. » En effet, de ce que les péchés que l’homme commet à propos des choses matérielles doivent être mis sur le compte de la volonté qui est spirituelle, il ne s’ensuit pas que cette volonté puisse innocemment user des choses matérielles, lorsque Dieu, ou son Église qui commande en son nom, le défendent. Dieu défendit à nos premiers pères, sous peine de mort, de manger du fruit d’un certain arbre ; ils en mangèrent et furent coupables. Est-ce parce que le fruit en lui-même était impur ? Non ; ce fruit était une créature de Dieu comme les autres fruits du jardin ; mais le cœur de nos premiers parents accueillit la pensée de la désobéissance et s’y livra : voilà comment le péché fut commis à l’occasion d’un fruit. Par sa loi donnée sur le Sinaï, Dieu avait interdit aux Hébreux l’usage de la chair de certaines espèces d’animaux ; s’ils en mangeaient, ils devenaient coupables, parce qu’ils avaient désobéi au Seigneur, et non parce que ces viandes étaient maudites en elles-mêmes. Les préceptes de l’Église relatifs au jeûne et à l’abstinence sont de même nature que ceux que nous venons de rappeler. Afin de nous donner lieu d’appliquer en nous, et uniquement dans notre intérêt, le principe de la pénitence chrétienne, l’Église nous prescrit l’abstinence dans une certaine mesure ; si nous violons sa loi, ce ne sont pas les mets dont nous usons qui nous souillent : c’est la révolte contre un pouvoir sacré que Jésus-Christ recommandait hier à notre respect avec tant d’énergie, qu’il ne faisait pas difficulté de nous dire que quiconque n’écoute pas l’Église doit être tenu par nous au rang des païens.

L’Église gothique d’Espagne nous offrira encore aujourd’hui une des solennelles Supplications qu’elle adressait à Dieu, pendant le Carême.

Preces. (Breviar. Mozarab. Ad Sextam in IV Feria V Hebdomadæ.)

Rédempteur de tous, roi suprême, nous élevons vers vous nos yeux baignés de pleurs ; exaucez, ô Christ, vos suppliants. R/. Ayez pitié.

V/. Droite du Père, pierre angulaire, voie du salut, porte du ciel, lavez les taches de nos péchés. R/. Ayez pitié.

V/. Nous prions, ô Dieu, votre majesté ; que votre oreille sacrée écoute nos gémissements ; dans votre indulgence, remettez nos crimes. R/. Ayez pitié.

V/. Nous vous confessons le mal commis ; d’un cœur contrit nous révélons nos secrets ; ô Rédempteur, que votre bonté pardonne ! R/. Ayez pitié.

V/. O vous l’innocent chargé de fers, entraîné par vos ennemis sans résistance, condamné sur de faux témoignages à la mort pour les impies ; conservez, ô Christ, ceux que vous avez rachetés. R/. Ayez pitié.